12 décembre 2016 840 mots, 4 min. de lecture Dernière mise à jour : 8 novembre 2023

Amazon Go : une révolution retail et quelques secrets bien gardés

Par Pierre-Nicolas Schwab Docteur en marketing, directeur de IntoTheMinds
Amazon Go est un magasin 100% connecté où il n’est plus nécessaire de passer à la caisse. Tout y est automatisé (regardez la vidéo ci-dessous). Amazon Go correspond à la convergence de 3 tendances importantes : la première est la […]

Amazon Go est un magasin 100% connecté où il n’est plus nécessaire de passer à la caisse. Tout y est automatisé (regardez la vidéo ci-dessous). Amazon Go correspond à la convergence de 3 tendances importantes :

  1. la première est la diversification entamée par Amazon dans les magasins « en dur » (ce qu’on appelle le « brick-and-mortar » en anglais)
  2. la deuxième est une tendance compresser les coûts dans le commerce de détail pour dégager des marges d’exploitation plus importantes
  3. la troisième est la poursuite de la quête vers la modélisation de tous les comportements humains afin de mieux les prédire

Tendance n°1: la diversification d’Amazon dans le commerce traditionnel

Le lancement d’Amazon Go n’est en soi pas une surprise. Il s’agit d’une extension d’expérimentations déjà en cours comme des magasins éphémères puis une librairie bien tangible (et pour le long-terme) au siège de Seattle.
L’annonce du lancement d’Amazon Go montre qu’Amazon est plus disposé que jamais à révolutionner l’industrie du commerce de détail traditionnel après avoir inventé le e-commerce.
Pour réaliser cette vision, Amazon peut compter sur une maîtrise top niveau de la supply chain, sur des processus et des méthodes de classe mondiale, un réseau d’entrepôts bien établi et un réseau existant de fournisseurs.
La combinaison unique de ces 3 facteurs (réseau d’entrepôts, réseau de fournisseurs, qualité de la supply-chain) permet à Amazon d’être dans une position unique pour apporter un bouleversement, une rupture, dans l’évolution du retail traditionnel.

Tendance n°2: moins d’employés, plus de marge

Les marges dans le secteur du détail sont minces. C’est un secteur qui compte sur les volumes pour dégager des bénéfices, où l’intégration verticale est essentielle pour économiser et être rentable. Un bon exemple de cette verticalisation est Colruyt en Belgique dont la rentabilité est un cas unique dans l’industrie retail.
Il est également possible de réduire les coûts en optimisant les points de vente et en en réduisant le nombre d’employés (cette stratégie est celle suivie par Lidl et Aldi dont les employés sont polyvalents et dont la charge de travail est très importante). Le rêve d’un magasin sans employés n’est donc pas utopique et c’est ce qu’Amazon veut réaliser grâce à des moyens technologiques inédits. Les prémisses de cette évolution étaient déjà visibles avec des dispositifs comme le self-scan, le quick scan et autres drives.
Amazon a fait un grand bond en avant en sautant toutes ces étapes intermédiaires et en créant un magasin sans employés. Couplé aux synergies existantes avec l’activité online, cela devrait assurer une rentabilité encore jamais vue.

Tendance n°3: plus de données sur le comportement des consommateurs

La dernière tendance est inhérente au déploiement des technologies Big Data dans les entreprises et en particulier de la modélisation comportementale. Modéliser un comportement online est possible, largement répandu, mais encore très imparfait; la faute à la complexité de l’être humain, à ses réactions émotionnelles, à ses sens en éveil, dont l’alchimie ne produit pas de données. Les signaux et traces que nous laissons derrière nous quand nous faisons nos emplettes ne reflètent qu’une petite partie des processus décisionnels à l’oeuvre dans nos cerveaux. Même les meilleurs algorithmes ne peuvent modéliser une telle complexité à partir des données explicites et implicites dont nous disposons. Les émotions par exemple sont difficiles à déduire à partir d’un texte, alors ne parlons même pas d’un mouvement de souris en ligne. D’autres technologies doivent être mises en œuvre pour mieux saisir la complexité de l’être humain et nous sommes persuadés qu’Amazon Go est un laboratoire pour expérimenter jusqu’à quel point les technologies de vision et les capteurs peuvent être utilisés pour mieux prédire les comportements humains.

Conclusion

Bien qu’Amazon Go constitue un véritable bond en avant et ait le potentiel de révolutionner le secteur du commerce de détail, nous pensons que le vrai but d’Amazon est ailleurs. Avec ce nouveau type de magasin, Amazon veut expérimenter des technologies permettant de recueillir de nouveaux types de données puis de les analyser afin de mieux prédire les comportements des consommateurs. Amazon a depuis le début été un champion de l’intelligence artificielle. On estime qu’ils se sont équipés de leur premier système de recommandation dès 1994. Aujourd’hui, surtout dans le secteur du retail, les algorithmes de recommandation ne peuvent plus être améliorés qu’à la marge. Une amélioration importante de leur « pouvoir de prédiction » n’est possible qu’au travers de la collecte de nouveaux types de données, plus intrusives (comme dans le cas du secteur de l’assurance : boîtes noires et objets connectés). Notre hypothèse de travail est donc qu’Amazon Go servira avant tout à récolter ces données d’un nouveau genre, ultra intrusives.



Publié dans Data et IT, Innovation, Marketing.

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