12 avril 2017 874 mots, 4 min. de lecture

Interview d’Edward Vizard sur la mise en place d’un système Pay-What-You-Want (PWYW)

Par Pierre-Nicolas Schwab Docteur en marketing, directeur de IntoTheMinds
Il y a quelques semaines nous nous étions fait l’écho de l’utilisation d’un système de pricing innovant mais toutefois peu répandu : le Pay-What-You-Want (PWYW). Utilisé dans le cadre des soldes du site d’e-commerce Garçonne & Chérubin, nous revenons aujourd’hui avec […]

Il y a quelques semaines nous nous étions fait l’écho de l’utilisation d’un système de pricing innovant mais toutefois peu répandu : le Pay-What-You-Want (PWYW). Utilisé dans le cadre des soldes du site d’e-commerce Garçonne & Chérubin, nous revenons aujourd’hui avec son fondateur, Edward Vizard, sur le bilan qu’il en tire.

IntoTheMinds : Comment vous est venue l’idée de faire un système Pay-What-You-Want ?

Edward Vizard : Etant d’origine britannique et particulièrement intéressé par les rapport à la consommation outre-Manche, c’est en m’intéressant aux innovations des techniques de vente anglo-saxonnes que j’ai pu observer une nouvelle tendance comparable à celle que nous avons mis en place. Des marques comme Everlane aux Etats-Unis proposent ainsi pendant les soldes de choisir 3 prix, accordant ainsi au consommateur le choix du prix qu’il souhaite payer pour le produit. Dans les grandes lignes, le premier prix couvre les couts de production, le second, les couts de production + les frais de structure, et enfin le prix le plus élevé permet à la marque de dégager une marge pour se développer.
Notre idée à nous fonctionne de la façon suivante :
Le client choisi le prix qu’il souhaite payer (sans minimum, ni maximum) en fonction de ce qu’il estime lui donner une chance de « remporter » le produit. C’est donc un pari, qui s’assimile à de la vente aux enchères.
Au bout d’une période donnée (une semaine), le client est notifié si oui ou non, son offre a été retenue. Le succès de son offre dépend du prix fixé en comparaison aux offres proposées par les autres consommateurs sur le même produit, ainsi que des niveaux de stock disponibles sur cette référence.
Ces deux systèmes – assez comparable dans l’approche – ont pour incidence de donner au consommateur la possibilité de comprendre la logique du prix et d’y participer activement, sans le subir. En France, la logique de croissance par profit est encore assez mal vue (par héritage culturel), d’ou la tendance des marques à « cacher » au maximum leur nécessité de vendre à profit pour se développer, ce qui est pourtant à la base de tout business viable. Ce type d’innovations permettent de mettre en lumières certaines de ces contradictions et de faire évoluer les tendances.

IntoTheMinds : Quels sont les avantages de ce système par rapport à des soldes classiques ?

Edward Vizard : Ce système est avantageux pour nous car il nous permet de jouer agilement avec les aléas de la consommation. Etant sur le marché de la chaussure, nous avons une problématique de pointures, que nous devons gérer au mieux. Si statistiquement, un 38 se vend mieux qu’un 36, rien ne nous assure que sur une collection, ce ne soit pas l’inverse qui soit observé. Pour autant, les deux pointures ont exactement la même valeur marchande.
Ainsi, permettre au client de fixer librement son prix nous permet de vendre nos fins de collections au prix de marché le plus juste, à la fois pour nous et pour nos clients.

IntoTheMinds : Certains e-commerçants ont massivement recruté de nouveaux clients grâce à ce système (Brandalley) mais on été incapables de les garder sur le long-terme. Quelle est votre stratégie pour éviter les mêmes déconvenues ?

Edward Vizard : Le système tenté par Brandalley est radicalement différent. Ce qu’ils ont mis en place, c’est un système permettant à leur client de payer le prix qu’ils voulaient sur une selection de produits, et ce, sans limites, ni logique de marché. Ils ont donc du expédier beaucoup de marchandises vendus à 1€, générant ainsi beaucoup de pertes. Ainsi, cette opération ne correspond a aucune logique économique viable et permet au mieux un coup de com’ sur une durée limitée. Nous sommes aujourd’hui à l’opposé de cette philosophie, en privilégiant une consommation lente et réfléchie de nos créations.

IntoTheMinds : Vous avez clôturé le 08/02 la possibilité d’utiliser le Pay-What-You-Want. Quel bilan tirez-vous et allez-vous renouveler l’opération dans le futur ?

Edward Vizard : Notre ticket moyen est similaire à celui que nous observions durant les soldes classiques (-35% en moyenne). En revanche, le nombre de transactions réussies a augmenté de 30% par rapport aux soldes classiques.
A noter que sur 100 transactions totales (acceptées et refusées), 33 (1/3) ont été acceptées. C’est donc 66 interactions et échanges supplémentaires avec notre communauté en comparaison d’une période de soldes classiques. Nous avons d’ailleurs eu des retours spécifiques très positifs de la part de nos clients sur ce concept.
Pour ce qui est de la suite, nous avons lancé le concept avec une stratégie de long-terme, et envisageons de le reconduire lors des prochaines périodes de soldes. Il pourra également être précédé d’une courte période de soldes, avec des décotes limitées, car nous pensons que ces deux systèmes sont compatibles et complémentaires.



Publié dans Innovation, Marketing.

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