12 avril 2013 866 mots, 4 min. de lecture

Trouvez votre public: comment positionner vos travaux de recherche

Par Pierre-Nicolas Schwab Docteur en marketing, directeur de IntoTheMinds
Comme je l’expliquais dans un précédent post, j’ai été très déçu de voir mon travail de recherche a rejeté lors de la conférence EMAC de cette année. Heureusement, le même travail de recherche a été accepté et présenté lors de […]

Comme je l’expliquais dans un précédent post, j’ai été très déçu de voir mon travail de recherche a rejeté lors de la conférence EMAC de cette année.
Heureusement, le même travail de recherche a été accepté et présenté lors de la 5e Conférence internationale sur la rhétorique et la narration appliquées au management (« International Conference on Rhetoric and Narratives in Management Research » en anglais dans le texte). Cette conférence, bien que de taille plus restreinte que l’EMAC et ses centaines de participants, m’a donné un grand élan d’énergie … et d’espoir. J’ai finalement été en mesure de trouver des gens que la recherche interdisciplinaire passionnait et désireux de mélanger les techniques et les champs de recherche pour faire émerger de nouvelles perspectives.
Lors de la conférence la tendance actuelle qui veut que les chercheurs travaillent en silos a été discuté à maintes reprises. Il semble en effet que le système, perverti, a lentement mais surement cantonné les scientifiques à l’intérieur de leur discipline sans leur laisser d’échappatoire. Les universités ont incités les chercheurs à ne publier que dans les revues de rang A. Ces revues ont à leur tour généralisé un processus d’approbation des articles en double aveugle (sur laquelle l’auteur n’a aucun contrôle) avec les examinateurs hyper-spécialisés. Ces relecteurs, également auteurs, ont tendance à défendre leurs positions et leurs champs d’expertise et ne permettent ainsi pas à des coutants de recherche novateurs d’émerger. Le processus d’évaluation en double aveugle leur donne un droit de veto sur les recherches qui peuvent menacer leurs intérêts personnels.

En conséquence de quoi les magazines scientifiques ont la fâcheuse tendance à devenir eux-mêmes le reflet de leurs processus de sélection et tendent à devenir homogènes et trop peu diversifiés dans le type d’articles publiés. Il y a désormais une foultitude de magazines hyper-spécialisés et la probabilité d’avoir un impact sur la recherche scientifique diminue au même rythme que le nombre de journaux augmente. Un collègue m’expliquait lors de la conférence de Barcelone qu’il avait reçu une distinction d’un magazine car il avait publié l’article ayant eu le plus d’impact. Concrètement son article avait été cité 10 fois … en 3 ans. C’était le record. Un triste record tout de même pour tant de travail.

 

Heureusement des magazines existent qui ont une politique éditoriale plus « permissive » et ont pour but de stimuler la recherche interdisciplinaire. Le Journal of Organizational Change Management (JOCM) est l’un d’eux. Sa ligne éditoriale est définie de la manière suivante

The goal of the journal is to provide alternative philosophies for organizational change and development. To accomplish this goal, the journal encourages:

  • The exploration of philosophies including; critical theory, postmodernism and poststructuralism as they apply to change and development
  • Qualitative analyses of change, discourse and change practices
  • Interdisciplinary approaches such as organization and ecology, consumption and production and rhetorics and theatrics of change and development;
  • Articles which tie into, or disagree with, themes from prior issues.

 

En français dans le texte:

“le but du journal est de proposer des philosophies alternatives à l’organisation et au développement. Pour atteindre ce but l magazine encourage :

  • L’exploration de philosophies telles que : théorie critique, postmodernisme et poststructuralisme lorsqu’elles s’appliquent au changement et au développement
  • Analyse qualitative du changement, du discours et des pratiques liées au changement
  • Approches interdisciplinaires telles que organisation et écologie, consommation et production, et rhétorique et étude théâtrale du changement et du développement
  • Articles qui confirment ou infirment des thématiques abordées dans des numéros précédents »

 

Une grosse dose de courage et de vision est nécessaire pour casser les règles, s’affranchir des codes et encourager des processus qui peuvent apparaître comme « déviants » de la norme. Mais qu’est-ce que la norme ? ne s’agit-il pas en fait d’un symptôme de l’immobilisme ?

Après toutes les discussions passionnantes que j’ai eues à Barcelone, je suis convaincu que dévier de la norme, oser la recherche scientifique aux interfaces entre plusieurs disciplines doit être encouragée car elle est source de nouvelles découvertes. Les entreprises ont depuis longtemps compris que le travail en silos n’était pas le plus efficace ; pourquoi la recherche scientifique, d’ordinaire prompte à inspirer les pratiques des entreprises, ne pourrait-elles s’est fois-ci faire le contraire ? Il y a de plus en plus de personnes qui font ce même constat et qui refusent de s’inscrire dans un système structuré en silos. Ces personnes, qui prépare le terreau d’où germera une nouvelle classe de travaux scientifique, sont ceux que vous devriez suivre car ce sont eux qui vous encourageront à poursuivre vos recherches, même si elles sont controversées.



Publié dans Recherche.

1 commentaire

  1. Merci pour ce post Pierre-Nicolas.
    Je suis tout à fait d’accord sur l’importance d’encourager une approche interdisplinaire, notamment dans le domaine médical. Cet article publié dans le Time Magazine récemment est éloquent sur ce sujet:http://healthland.time.com/2013/04/01/the-conspiracy-to-end-cancer/

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