2 mars 2022 814 mots, 4 min. de lecture

Et si les voyages d’affaires disparaissaient ? [Analyse]

Par Pierre-Nicolas Schwab Docteur en marketing, directeur de IntoTheMinds
La crise du Covid va modifier pour toujours le marché des voyages d’affaires. Malgré les limites du télétravail et le retour au travail en présentiel, les voyages d’affaires vont se faire de plus en plus rares. Les statistiques actuelles montrent […]

La crise du Covid va modifier pour toujours le marché des voyages d’affaires. Malgré les limites du télétravail et le retour au travail en présentiel, les voyages d’affaires vont se faire de plus en plus rares. Les statistiques actuelles montrent une diminution d’une ampleur sans précédent, qui remet en cause l’existence même de certains secteurs économiques.

Voyages d’affaires : statistiques post-Covid

  • -50% : la baisse structurelle du nombre de voyages d’affaires selon Bill Gates
  • -63% : la baisse des ventes hebdomadaires de billets aux entreprises américaines par rapport à 2019 (chiffres au 23/01/22)
  • -75% : baisse du nombre de voyageurs dans les TGV (trains à grande vitesse) en France
  • 25% à 33% : le taux d’occupation moyen des hôtels en milieu urbain en 2021
  • 55% à 75% : la part des profits représentée par les voyages d’affaires pour les compagnies aériennes traditionnelles
  • -80% : la baisse de fréquentation des visiteurs étrangers dans les grands salons professionnels européens

Évolution du marché des voyages d’affaires

Les études de marché que nous avons réalisées auprès des décideurs B2B montrent que les entreprises vont diviser par 2 les voyages d’affaires. Leur volume ne reviendra donc plus à son niveau pré-Covid.

Cette diminution structurelle s’explique par 3 facteurs :

Habitudes digitales

La transition forcée vers le digital a fait rentrer la visioconférence dans les mœurs. Les pratiques des entreprises en sont modifiées de manière permanente. Aussi bien les réunions internes que les réunions avec des clients se déroulent désormais par visioconférence interposée.

Image éco-responsable

A l’heure du réchauffement climatique, les entreprises veulent être perçues comme éco-responsables. La diminution des voyages d’affaires permet d’atteindre cet objectif marketing. N’oublions toutefois pas que le digital est également une source de pollution.

Inflation et prix des voyages

Il n’aura échappé à personne que l’inflation s’est installée pour durer. Cette inflation est largement due à une composante énergétique (prix du gaz et de l’électricité). Avec un baril de pétrole qui atteint des sommets, le prix des billets d’avion va devoir être revu à la hausse. Le budget des voyages d’affaires va donc sensiblement augmenter, ce qui va être un argument supplémentaire des entreprises pour les limiter au strict minimum.


A terme, le volume de voyages d’affaires post-Covid sera amputé de 50% par rapport à 2019.



Conséquences de la baisse des voyages d’affaires

La baisse structurelle des voyages aura des conséquences sur plusieurs secteurs.

Secteur aérien

Dans le prolongement de notre analyse sur l’impact du Covid sur les compagnies aériennes, il faut s’attendre à un remodelage complet du business model des compagnies aériennes traditionnelles. Les voyages d’affaires représentent en effet entre 55% et 75% de leurs profits. Ceci devrait donner encore plus de marge de manÅ“uvre aux compagnies low-cost dont les revenus sont indépendants des voyageurs business. A terme, on peut même se demander si le low-cost ne deviendra pas le standard en matière de voyage par avion

Pour les compagnies traditionnelles, la désertion de la classe business pourrait, au-delà de la baisse de revenus, également initier une réflexion sur l’aménagement des cabines. De la même manière que la 1ère classe est devenue de plus en plus rare, ne risque-t-on pas de voir l’espace business être phagocyté par des sièges éco ?

Salons professionnels

Malgré une situation épidémique meilleure en 2022, les grands salons européens accusent une baisse de fréquentation de l’ordre de 80% des visiteurs étrangers.

Certains salons devraient moins souffrir que d’autres. Le secteur du luxe est par exemple relativement épargné. On peut espérer que certains autres secteurs (notamment l’alimentation avec le SIAL en Octobre 2022) ne souffriront pas trop.

Secteur hôtelier

Le secteur hôtelier va continuer encore longtemps de souffrir des conséquences du Covid. Si l’hôtellerie de luxe semble plus épargnée par la raréfaction des voyages d’affaires, les autres établissements voient leur taux d’occupation rester bas.  La semaine du 03 au 09 janvier 2022, le taux d’occupation s’est établi à 37,4%, contre 52,8% avant-crise.


Conclusion

La baisse des voyages d’affaires est structurelle. Le volume de voyages d’affaires post-Covid sera amputé de moitié par rapport à 2019.

Les compagnies aériennes traditionnelles devront sans doute réinventer leur business model. Le low-cost pourrait, à terme, capter une part de marché encore plus grande.

Quant aux salons professionnels et à l’hôtellerie, on peut raisonnablement penser qu’une consolidation aura lieu. Certains salons B2B, au rayonnement insuffisant, pourraient disparaître. En termes de taille, nous pensons que les salons régionaux et les salons mondiaux (CES, …) sont les mieux placés pour résister. Certains secteurs, moins prompts à se digitaliser, devraient également bien résister.

 

 

 

 

 

 

 



Publié dans Stratégie.

Donnez votre avis

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *