92% des restaurants étoilés exigent une empreinte bancaire

Les « no shows » sont une plaie pour les restaurateurs. Les clients qui réservent une table et décommandent au dernier moment, voire ne se présentent pas du tout, affectent de manière importante la rentabilité des restaurants. De plus en plus d’établissements demandent désormais une empreinte bancaire, c’est-à-dire qu’ils sécurisent un montant parfois très important sur la carte de crédit du client au moment de sa réservation. Dans cet article nous vous présentons les résultats d’une étude menée auprès de 39 restaurants étoilés dans 18 pays. Cette étude révèle des pratiques très diverses. Un restaurant danois demande même 2000€ par personne au moment de la réservation.

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Le problème des no-shows dans les restaurants

Le no-show c’est quand une personne ne se présente pas à un rendez-vous. Pour un restaurant, cela conduit à se retrouver avec une table vide qu’il est impossible de réallouer à un autre client. C’est donc une perte sèche pour le restaurateur. Le no-show est d’autant plus problématique dans la restauration que les commandes de produits ainsi que la planification du personnel se basent sur le nombre de clients ayant réservé. Outre le manque à gagner, il y a également des pertes à éponger. Un nombre limité de no-shows peut donc anéantir la rentabilité de tout un service. Certains restaurants sont d’ailleurs très transparents à ce sujet, comme Labyrinth à Singapour qui explique sur son module de réservation : « Les frais d’annulation reflètent le coût de la nourriture, des boissons et du personnel que nous avons engagés en prévision de la réservation, ainsi que le manque à gagner lié à la table vide. »

Un nombre limité de no-shows peut anéantir la rentabilité de tout un service.

Plus le prix du menu est élevé et plus le nombre de convives est élevé, plus le risque financier que représente un no-show est donc important. Avec l’inflation des matières premières et l’augmentation des salaires, le no-show est devenu insupportable pour les restaurateurs. Depuis 2022 on observe dès lors une modification profonde des pratiques en matière de réservation. Demander une empreinte bancaire au client au moment de la réservation est devenu une pratique courante.

92% des restaurants étoilés demandent une empreinte bancaire

L’étude de 39 restaurants appartenant au classement des 100 meilleurs restaurants du monde, montre que 92% d’entre eux demandent une empreinte bancaire. Certains appliquent même des pénalités supérieures au prix du menu en cas de no show. Et 1/3 de ces restaurants attendent du client qu’il paye à l’avance l’entièreté de son menu. Il ne lui restera alors qu’à payer ses boissons le jour J.

L’empreinte bancaire peut d’ailleurs atteindre des sommes faramineuses. Si Enrico Bartolini impose un forfait de 500€ (et une pénalité du même montant pour toute annulation 72 heures ou moins avant le jour du repas), la palme revient à Alchemist à Copenhague. Ce restaurant très conceptuel impose un prépaiement de 14900 DKK, soit 2000€, par convive. Cela correspond au prix du menu et on peut comprendre qu’un no-show aurait un impact intolérable sur l’équilibre financier de l’établissement.

Dans notre étude nous n’avons trouvé que 3 restaurants étoilés qui ne demandaient pas d’empreinte bancaire. Il s’agissait de restaurants pratiquant des prix « raisonnables » au regard de leur appartenance au classement : Lido84 (menu le plus cher à 150€), Fu He Hui (110€) et Maito (92€). Au-delà de 150€ toutefois, 100% des restaurants demandaient une empreinte bancaire.

1/3 des restaurants étoilés demandent un prépaiement du menu

Nous constatons qu’un tiers (14 restaurants sur 39) demandent le prépaiement complet du menu. Ceci impose donc de choisir, lorsqu’un choix existe, son menu au moment de la réservation. Ce principe s’applique à des établissements dont les prix s’étalent de 90€ à 370€ par personne. Il n’y a donc pas de montant minimum pour imposer cette règle.

Il est tout à fait intéressant de noter que dans certains cas les établissements adaptent leur sémantique. On ne parle plus alors de « réserver une table » mais d’acheter « un ticket » ou « une place » (voir l’exemple de Alchemist à Copenhague ci-dessous). Certains vont même jusqu’à faire preuve de pédagogie en expliquant qu’ils calquent leurs pratiques sur celles du spectacle.

L’empreinte bancaire : à manier avec précaution

Demander une empreinte bancaire n’est pas une décision à prendre à la légère. En effet, si elle conduit à annihiler les risques de no-shows (1% au maximum, contre 10% à 30% sans), elle présente aussi certains désavantages.

Le premier désavantage est bien entendu que le montant demandé peut représenter un frein pour le client. Les achats impulsifs seront donc moins légion et il est probable que le ticket moyen s’en ressente. Il faut donc bien peser le pour et le contre et comparer l’impact financier des no-shows à la baisse possible du ticket moyen.

Il faudra comparer l’impact financier des no-shows à la baisse possible du ticket moyen.

L’autre désavantage est pour le consommateur. Ce dernier doit en effet dans certains cas choisir des mois à l’avance le menu pour lequel il optera. En termes de flexibilité ce n’est pas optimal. Là encore, cela peut freiner les décisions d’achat impulsives qui auraient profité au restaurateur.

Conclusion

L’empreinte bancaire s’impose depuis 2022 dans les restaurants. Face à des coûts d’exploitation élevés encore renchéris par l’inflation, les no-shows remettent en cause l’équilibre financier d’établissements déjà mis sous tension.

L’empreinte bancaire s’est popularisée auprès des restaurants fonctionnant sur le mode de la réservation. Les services de réservation tiers comme Zenchef ont mis à disposition cette nouvelle fonctionnalité pour un coût somme toute modeste (2000€ par an). Elle permet de réduire le taux de no-shows à 1% environ, éliminant de facto leur risque financier.

Tous les établissements ne sont toutefois pas adaptés à ce mode de fonctionnement. Ceux qui attire une clientèle de passage et les restaurants non étoilés doivent véritablement étudier les avantages et les inconvénients de ce système, et se souvenir en particulier que l’empreinte bancaire peut agir comme un repoussoir.

Liste des restaurants étudiés et des prix relevés

Par Pierre-Nicolas Schwab Pierre-Nicolas est Docteur en Marketing et dirige l'agence d'études de marché IntoTheMinds. Ses domaines de prédilection sont le BigData l'e-commerce, le commerce de proximité, l'HoReCa et la logistique. Il est également chercheur en marketing à l'Université Libre de Bruxelles et sert de coach et formateur à plusieurs organisations et institutions publiques. Il peut être contacté par email, Linkedin ou par téléphone (+32 486 42 79 42)