12 juin 2023 1638 mots, 7 min. de lecture

Les plugins ChatGPT vont révolutionner le e-commerce

Par Pierre-Nicolas Schwab Docteur en marketing, directeur de IntoTheMinds
En 2019 j’avais annoncé l’échec des enceintes connectées, en 2021 celui du metaverse. En 2023 j’annonçais à qui voulait l’entendre que ChatGPT ne remplacerait pas Google. Il y a par contre une chose en laquelle je crois, c’est la puissance […]

En 2019 j’avais annoncé l’échec des enceintes connectées, en 2021 celui du metaverse. En 2023 j’annonçais à qui voulait l’entendre que ChatGPT ne remplacerait pas Google. Il y a par contre une chose en laquelle je crois, c’est la puissance des plugins ChatGPT. Les LLM (Large Language Models) sont une révolution qui trouvera ses plus belles applications dans ces plugins dont on commence à peine à entrevoir la puissance.

ChatGPT n’est pas une révolution

ChatGPT n’est pas la révolution qu’on annonce. La raison en est simple : les habitudes. Le cerveau humain a évolué pour être le plus efficace possible. C’est dans notre cerebellum que ce sont stockées toutes nos habitudes, et que sont prises la majorité de nos 4000 décisions quotidiennes.

Notre cerveau est donc conçu pour « privilégier le chemin le plus court » et réduire au maximum la charge cognitive et les dépenses d’énergie.

cerebrum cerebellum

Utiliser ChatGPT impose de « verbaliser » sa demande. Il faut en plus la préciser de manière itérative pour obtenir de bons résultats. C’est là que réside la faiblesse de l’IA générative. C’est ce qui a fait dire au Dr. Milan Milanovic sur Twitter que les développeurs n’ont rien à craindre de ChatGPT.

tweet by milan milanovic on generative ai

Cette phrase a été reprise par d’autres pour montrer que nous pourrions être le principal point de blocage de l’IA générative.

replace graphic designers with AI

C’est ce qui m’a fait dire, dans un autre article, que ChatGPT ne replacerait pas Google. En effet j’avais observé que seules 10,53% des recherches sur Internet étaient « verbalisées », c’est-à-dire effectuées en langage naturel. Le reste des requêtes consistait encore en une juxtaposition de mots-clés.

Je pense donc moi aussi que nous sommes « safe », du moins jusqu’à ce que les entreprises comprennent l’intérêt des plugins de ChatGPT.


Les plugins ChatGPT sont une révolution

Les plugins de ChatGPT sont disponibles depuis le 15 Mai 2023 en version Beta à tous les utilisateurs payants (20$/mois).

Ils permettent d’obtenir des réponses en utilisant une fonctionnalité particulière. Il y en a pour tous les goûts et il faut bien avouer que les plugins les plus intéressants en côtoient d’autres qui n’ont que peu d’intérêt. Mais avant d’expliquer pourquoi les plugins de ChatGPT sont une révolution, permettez-moi d’expliquer ce qu’ils sont.

plugins chatgpt


A quoi servent les plugins de ChatGPT ?

Les plugins de ChatGPT sont des raccourcis. Ils vous permettent d’effectuer une action bien précise tout en restant dans l’environnement du chatbot et en continuant d’interagir avec GPT4, le LLM (Large Language Model) sous-jacent.

Le plugin peut donc aussi être appréhendé comme une série d’instructions, plus ou moins complexes. Elles permettent de simplifier le traitement de données en proposant un certain degré d’automatisation. Si tout ceci reste abstrait, tout devrait devenir plus clair dans le paragraphe suivant avec quelques exemples.


Plugins Chatgpt : le prochain app store ?

Notons tout d’abord qu’OpenAI a dénommé sa bibliothèque de plugins le « plugin store ». Je me demande où ils ont été chercher ce nom 😂. Les plugins ChatGPT ressemblent d’ailleurs furieusement à ce que vous pourrez trouver sur Apple ou Android. « Avalara » vous propose de calculer votre taxe foncière en fonction du lieu où vous habitez, « Tic Tac Toe » vous propose de jouer, « ArtCollection » de parcourir la collection du Metropolitan Art Museum de New-York. C’est simple et sans grand intérêt.

A côté de cela, vous trouvez fort heureusement des plugins qui proposent de vous aider dans la réalisation de tâches plus complexes. Je pense que c’est là l’essence même du plugin. Un bon plugin ChatGPT vous permet d’automatiser simplement une tâche complexe en utilisant toute la puissance de GPT4. Prenons quelques exemples.

Plugin 1 : Photorealistic

« Photorealistic » est un plugin qui vous permet de générer facilement des prompts pour MidJourney. Si vous avez déjà essayé MidJourney, vous savez que le prompt est un élément essentiel du résultat et qu’il vous faudra le modifier à plusieurs reprises pour obtenir le résultat désiré. C’est en tout cas l’expérience que j’avais faite lorsque j’avais réalisé mon expérience avec les sacs Louis Vuitton imaginaires.


Plugin 2 : AskYourPdf

« AskYourPDF » est un plugin qui vous permet d’interagir avec un pdf. Une des limites de ChatGPT est la fenêtre dans laquelle vous interagissez. Vous ne pouvez y taper que du texte et la taille de ce texte est d’ailleurs limitée. Il faut donc des plugins pour interagir avec des éléments extérieurs comme des fichiers. C’est exactement ce que propose AskYourPDF et c’est très utile pour, par exemple, résumer un rapport ou traiter des données qui se trouvent dans un fichier de ce type. Rappelez-vous toutefois que l’usage de ChatGPT présente des dangers en matière de confidentialité des données.


Plugin 3 : ChatWithVideo

« ChatWithVideo » est un plugin qui permet d’analyser le contenu de vidéo YouTube. L’outil est très utile pour structurer des informations à partir d’une vidéo. Je vous en fais une petite démonstration dans la vidéo ci-dessous.


Pourquoi (certains) plugins ChatGPT sont disruptifs

Le caractère disruptif de certains plugins tient à la complexité des tâches qui peuvent désormais être automatisées. L’automatisation a été le moteur de la digitalisation et des gains d’efficacité des entreprises ces 15 dernières années. Grâce aux LLM, les limites ont été repoussées et avec elles les gains d’efficacité des entreprises.

Certains plugins tirent le meilleur parti de GPT4 tout en proposant une intégration avec une application tierce. Le caractère disruptif est maximum lors le passage de GPT4 vers une application est compliqué et présente une haute valeur ajoutée pour l’utilisateur. C’est exactement le cas d’usage que je vous présente dans le paragraphe suivant.


Le plugin Instacart a tué le business model d’Hello Fresh.


Exemple d’une utilisation disruptive : le plugin Instacart

Le cas d’usage que je présente dans ce paragraphe est un résumé d’un article très complet que j’ai consacré à l’intégration de recettes dans les applications des retailers alimentaires.

Les distributeurs qui pratiquent l’e-commerce ont bien compris tout l’intérêt d’intégrer des recettes dans leurs applications. Elles leur permettent d’augmenter le panier moyen (+20%) et sont un excellent moyen de faire du cross-selling. Cela fonctionne tellement bien que des sociétés se sont positionnées sur le créneau en créant des applications de recette connectées aux applications des distributeurs. Un des leaders dans le domaine est Jow qui traite chaque mois 250.000 commandes et dont la base clients actifs atteint 1,5 million par mois. Assez pour générer 300 millions d’Euros de chiffre d’affaires chaque année.

Un plugin comme Instacart fait exploser les barrières et ajoute une flexibilité encore jamais vue. Vous pouvez désormais demander n’importe quelle recette (voire tous les repas de la semaine), les personnaliser en fonction de vos goûts, allergies ou des ingrédients que vous avez déjà, et demander à Instacart de vous préparer votre commande.

Cela n’a jamais été facile. Ce plugin ChatGPT a tué le business model d’Hello Fresh.


Cas d’usages encore plus disruptifs pour le e-commerce

A partir du cas d’usage précédent, il est possible d’imaginer des cas d’usage encore plus disruptifs. Imaginez un futur dans lequel un plugin vous permettrait de :

  • exprimer un besoin
  • recevoir des suggestions de solutions pour y répondre
  • demander des offres auprès de différents fournisseurs
  • comparer les offres
  • négocier les offres directement avec les fournisseurs
  • préparer un bon de commande prêt à signer

Aujourd’hui aucun plugin ne permet d’automatiser toutes ces étapes. Et pourtant, prises individuellement, chacune d’entre elles peut faire l’objet d’un traitement dans ChatGPT.

Je pense que nous ne sommes pas loin de voir certains types d’échanges complètement révolutionnés. Je ne suis toutefois pas sûr que ce soit toujours pour le meilleur.


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Réflexions finales et conclusions

Les plugins mis à disposition dans ChatGPT changent complètement l’usage qu’il est possible de faire de cet outil. On passe d’un chatbot limité par son dataset, à un assistant capable d’automatiser des tâches complexes.

Si la plupart des plugins actuellement disponibles offrent peu de valeur ajoutée, certains annoncent une révolution à laquelle les e-commerçants devraient se préparer. Certaines barrières, qui conditionnaient le comportement des consommateurs, sont en passe de tomber. Les plugins permettront dans le futur de simplifier des tâches cognitives complexes et de redonner du contrôle au consommateur en lui donnant la possibilité de choisir au mieux de ses intérêts.

Ces plugins présentent néanmoins une menace importante pour les retailers « classiques » qui n’adopteraient pas cette technologie suffisamment rapidement : la menace de perdre la relation avec le client. Si les consommateurs basculent sur des applications tierces pour effectuer leurs achats en ligne, les retailers risquent de perdre la relation client. Or, c’est cette relation client qui a fait leur richesse. D’une part les retailers ont joué sur la fidélisation et sur l’assortiment pour augmenter le panier moyen. D’autre part, leur monopole sur la relation leur a permis de monnayer les données clients aux marques et aux annonceurs. Tout cela pourrait bien changer demain.

Le stade ultime de l’intrusion des plugins dans notre vie pourrait être leur intégration dans les systèmes d’exploitation de nos smartphones. Imaginez ce qu’un assistant vocal couplé à GPT4 pourrait faire ? Si Apple et Google franchissent le pas, ce sont potentiellement eux qui domineraient la pyramide de la relation client. Il s’agirait alors d’un pas supplémentaire vers une concentration des données clients aux mains de quelques géants.



Publié dans Innovation.

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